lundi 4 août 2008

S comme Sanglier

Il y a quelques jours, nous avons eu une visite très inattendue... un Cochonglier !!! ou Cosanglier, Sangliochon, Sanglocochon, Sanglochon... comme il vous plaira...
Il avait l’habit du Sanglier, la queue droite du Sanglier, mais le groin et la rotondité d’un Cochon. Et cet animal, sensé être “gibier sauvage”, est venu jusqu’à la terrasse nous saluer, pas farouche pour 2 sous et ne tenant aucun compte de la présence des Chiens.

I
Il est vrai que tous ces “gibiers”, élevés avec soin dans des enclos bien grillagés au coeur des forêts, sont très habitués à l’Homme qui les nourrit et les soigne avant de les relâcher dans le milieu dit “naturel” où leur “sauvagerie” est censée reprendre le dessus dès qu’ils mettent une patte hors de l’enclos.
Et ne me dites pas que la main de l’Homme n’avait pas mis cette bête sur pied: elle était pourvue de 2 magnifiques anneaux de fer aux naseaux, et que je sache, le piercing n’est pas encore à la mode chez les hôtes de nos bois.
Après on viendra nous raconter que ces bêtes sauvaaages, dont on ne sait vraiment pas comment elles se sont croisées avec des Sangliers (probablement des Sangliers volants ???) prolifèrent, font des dégâts aux cultures, et il est ab-so-lu-ment nécessaire d’organiser des battues administratives ou autres pour essayer de les réguler... pfff...
Je me suis toujours demandé si nos tartarins, là, quand ils ont abattu un de ces “gibiers” d’élevage, la fierté qu’ils montrent sur la photo, un pied méprisant sur le “nuisible” abattu, (je vous jure que cette photo existe dans le dernier numéro du journal de notre village), cette fierté, là, est-elle vraiment totale ou, tout au fond de la partie humaine de leur cerveau, ils n’auraient pas comme un doute ???
Et dire que de tirer (par mégarde) sur une Vache, animal tout autant d’élevage que l’autre, est puni par la loi...
Il y a toujours quelque chose qui m’échappe dans les règles que s’est donné notre beau pays vis-à-vis des animaux.

Bon, on n’est pas là pour parler de la Nature revisitée par l’Homme, mais bien du Sanglier, irréductible et têtu hôte libre de nos bois.
Marcassin, Bête rousse , Ragot, Tiers-an (3 ans), Quartanier (4 ans), Vieux-Sanglier (5 ans), Grand Vieux-Sanglier (6 ans et plus), quelle est ta vie ?


Sus scrofa

Qui mieux que la Hulotte (le journal que les terriers du monde entier nous envient) peut nous la raconter ? Je vous recommande chaudement la lecture de son numéro 23 in extenso... Quelques extraits et raccourcis ci-dessous, juste pour vous mettre l’eau à la bouche.


“Que reste-t-il comme bête vraiment sauvage dans nos belles forêts ? Quel est le seul animal qui ait totalement refusé de se civiliser malgré les siècles ? Qui donc, tel un brutal et rustique seigneur du Moyen-Age, promène encore sa force tranquille sous les frondaisons, capable certes d’une grande patience et d’un calme admirable, mais sachant aussi se fâcher tout rouge pour peu qu’un malotru l’importune ? Bref, quelle est la seule bête sauvage qui fasse encore courir sur l’échine du promeneur isolé un agréable petit frisson d’angoisse ?
Vous l’avez reconnu, c’est le SANGLIER, celui que l’on appelait jadis la Bête Noire.”

Savez-vous que:

- c’est un merveilleux coureur de fond, capable, en temps normal (= hors chasse), de parcourir 80 km dans la nuit ?

- son groin ou “boutoir” lui sert à détecter sous les feuilles ou l’humus, la senteur discrète d’un Champignon comme les oeufs d’une Faisane ?

- que le jour (là où les hommes s’agitent), il le passe tranquillement dans sa “bauge”, petite dépression qu’il a vaguement creusée sous des branches tombantes ou dans un roncier impénétrable ?

- que la nuit, toute la famille se répand dans les bois, fouillant du boutoir les feuilles mortes pour se régaler de glands, faines, tubercules de l’Arum tacheté, racines de Fougères, fruits sauvages du Cornouiller, bulbes d’Aïl des Ours ... sans oublier larves, Escargots, Oisillons, Levrauts, Vipères, et même Hérissons ?

- que son bain de boue lui est indispensable, et que non “oh le cochon (sauvage) !” mais oui, “que cette bête est propre!” ? Que feriez-vous, vous, si vous étiez envahis de Tiques, Puces et autres bêtes suceuses de sang ? Je parie que vous n’hésiteriez pas:

1/ vous les enrobez dans de la boue (avec vous)

2/ vous laissez sécher

3/ vous vous frottez longuement les flancs contre un jeune Chêne...

Et voilà vous êtes propre jusqu’à demain !!!


Citations et Proverbes

"Lorsqu'en forêt une brindille tombe, le Cerf la voit, le Chevreuil l'entend et le Sanglier la sent"

(vieux dicton)

"Sanglier de glands rend le chasseur ardent..."

(dicton bourbonnais)

"Je vais t'apprendre à chasser... Nous commencerons par les Marcassins, et puis ensuite, nous passerons aux patrouilles romaines, et enfin aux Sangliers !"

(Obelix à Idefix)



"Le sanglier sait contre quel arbre il peut se gratter."
(Proverbe créole)

"Souvent le Marcassin expie les méfaits du Sanglier."

(Proverbe danois)

"Lorsqu’on a un litige avec un Cochon on ne prend pas le Sanglier comme témoin!"

(Proverbe Kimbala)


Contes et Légendes

Les Salies-de-Béarn, le sel et le Sanglier



"Il était une fois, il y a bien longtemps, car c'était au temps où les bêtes parlaient, un féroce Sanglier aux soies épineuses et au boutoir terrifiant qui dévastait la région appelée bien plus tard le Béarn, et couverte alors d'épaisses forêts. Il semait la terreur sur son passage... "
Ainsi commence l'histoire des origines de Salies-de-Béarn, par un véritable conte de fées, une légende bien connue de tous les habitants de Salies depuis fort longtemps ; " La légende du Sanglier ".


Selon cette légende, au Moyen-Age, des chasseurs blessèrent grièvement un Sanglier qui parvint à s’enfuir et à disparaître au plus profond des fourrés. Quelques jours plus tard, la bête fut retrouvée par hasard au bord d’un étang, morte, mais en parfait état de conservation. Ses soies étaient recouvertes d’une pellicule blanche scintillante, faite de cristaux de sel que l’eau avait déposés en s’évaporant. C’est ainsi que fut découverte la première source salée.

Les propriétaires de la source formèrent, pour l’exploiter, des établissements dont le premier fut une maison qu'on voit encore à l'un des coins du bassin où elle dépose ses eaux (la maison du Grand Balcon). Au-dessus de la petite porte qui lui sert d'entrée, on distinguait encore, il y a quelques années, sur une pierre marquée par l'empreinte des siècles, les pieds d'un Sanglier avec cette inscription béarnaise:



" Sé you n’ou éri mourt, arrès n’y biberé "
" Si je n’y était pas mort, personne n’y vivrait ".

Ces mots, qui auraient été prononcés par le fameux Sanglier, (rappelez-vous, en ces temps anciens, les animaux parlaient... même morts apparemment ! :o)) sont maintenant gravés sur le Fontaine du Sanglier de la place du Bayaà.


Il faut à la vérité de dire que dès les temps préhistoriques, vers l'an 2000 avant J. C., la cité du sel existait déjà. Son histoire tourmentée gravite autour de cette exploitation qui depuis le Haut Moyen Âge revient par héritage à un petit millier de Salisiens. Depuis cent ans, Salies est une ville thermale dont l'eau guérit et régénère




Humour grinçant mais juste.

Le Cochon et le Sanglier


Entre le Cochon et le Sanglier, il y a la différence, notamment, de l'état domestique à l'état sauvage.


Le Cochon est un produit cultivé tandis que le Sanglier pousse tout seul.


Le Cochon ne s'écarte guère de sa mangeoire où il est assuré de trouver force bonnes épluchures et le Sanglier quête à travers les grands bois illuminés des couleurs automnales, car il est lyrique, les glands savoureux, les racines fraîches et les Amanites sanglières qui sont, comme leur nom l'indique, des Champignons réservés à son usage.


Le Cochon a de la graisse, le Sanglier du muscle.


La peau du Cochon est épaisse, mais sensible, et celle du Sanglier, hérissée de crins poussiéreux, certes, mais fort nobles, résiste à des horions extrêmement sévères, voire acérés si l'on ose dire.


Naturellement, le Cochon mène une vie plus tranquille, dort sous un toit qui fuit le moins possible - car c'est un animal qui se vend régulièrement et une des nécessités du commerce est de présenter un produit de qualité constante, quasi-normalisée -, se lave parfois - il est moins sale qu'on veut le dire - et préside, lorsqu'il est vraiment devenu un très gros Cochon, à des cérémonies païennes dénommées “concours agricoles” à l'issue desquelles, après l'avoir embrassé, cajolé, décoré de la Légion d'honneur et proclamé très gros et très grand on l'immole d'un tranche-lard perfide et on vous le débite au cours du jour


Le Sanglier finit parfois aussi misérablement sur un étal ; mais jusqu'à son heure ultime, il résiste ; et il a souvent la joie posthume de se voir exposé intact, avec tous ses poils, chez Chatriot ou en quelque autre lieu de luxe ; car le Sanglier ne quitte guère l'empyrée. Jusqu'à son dernier jour, il lui reste la possibilité de se suicider en se lançant contre une automobile sur quelque autostrade et, si le cœur lui en dit, il peut même choisir pour lieu de cette expérience un pont qui corsera son action sublime d'une belle noyade.


Enfin, le Sanglier a une bonne réputation d'Ours, c'est étrange mais c'est ainsi, et figure avantageusement au blason d'illustres familles, quand son reflet rose, le Cochon, n'a guère que le loisir de décorer de son effigie la vitrine d'un charcutier aussi gras que lui-même.


Boris Vian


Dico:


LE SANGLIER: genre de Mammifères pachydermes dont le type habite l’Europe. Le sanglier est le porc sauvage; c’est un animal qui cause de grands ravages das les champs. Sa femelle se nomme laie et ses petits marcassins.

LE COCHONGLIER: hybride du Cochon et du Sanglier